Une Déclaration de Politique Régionale (DPR) ambitieuse pour l’agriculture (en particulier pour l’accès à la terre) et la nomination d’Anne-Catherine Dalcq comme Ministre de l’agriculture : une jeune agricultrice intelligente, dynamique, positive et constructive, bien consciente des enjeux.
Agir et prendre ses responsabilités : voilà un engagement qui nous inspire beaucoup et qui nous encourage à poursuivre notre travail pour soutenir celles et ceux qui nous nourrissent et préserver nos terres agricoles !
Et c’est justement ce travail de longue haleine pour que nous voyons récompensé dans le texte de la DPR, surtout sur le chapitre « agriculture ».
1. Tout d’abord, la protection des terres agricoles est affichée d’emblée comme objectif du chapitre « Aménagement du territoire ». La santé et la dépollution des sols est aussi un objectif du chapitre « Environnement ».
2. Concernant la politique foncière, nous retrouvons de nombreuses idées construites tout au long de ces 10 dernières années avec nos membres et nos partenaires (syndicats agricoles, associations, administrations et universités) et reprise dans notre memorandum.
Ce travail de memorandum nous a permis de rencontrer les principaux partis politiques, d’influencer leurs programmes, d’organiser un grand débat pré-électoral sur l’accès à la terre et de participer aux concertations du secteur agricole, organisées par le MR et les Engagés.
Comme dirait l’autre : « maintenant que c’est écrit, y a plus qu’à... » !
2.1. Pour commencer, la « transmission des fermes et la pérennisation du métier » sont identifiées comme premier enjeu, avec l’engagement de « renforcer les aides à l’installation et de prendre des mesures d’accompagnement pour les nouveaux repreneurs », ce qui nous permettra de poursuivre le projet Trans’Mission, que nous venons de lancer avec la FJA et la FUGEA.
2.2. « Les formes innovantes et professionnelles de gestion qui s’inscrivent dans le cadre de l’agriculture familiale, comme les coopératives, seront encouragées et des incitants seront explorés ». Nous comptons bien inscrire Terre-en-vue parmi ces initiatives professionnelles à encourager !
2.3. Plus ambitieux encore, « le Gouvernement s’attaquera au prix du foncier, en prenant des mesures, en ce compris fiscales, pour soutenir les agriculteurs actifs et lutter contre toute forme de spéculation ». Nous voyons notamment la possibilité de réduire les droits d’enregistrement pour les agriculteurs actifs (que le Gouvernement s’engage par ailleurs à définir ) ou les acquéreurs qui, comme Terre-en-vue, mettent directement les terres au service de l’agriculture via des baux à ferme, mais aussi la mise en place d’un droit de préemption au bénéfice de la Wallonie pour toutes les terres et non pas seulement un droit de préférence pour les terres publiques.
2.4. « Le travail de l’Observatoire foncier sera maintenu, voire amplifié ». Nous demanderons que des informations complémentaires soient collectées sur le profil des acheteurs (en particulier les acheteurs non agriculteurs qui représentent actuellement 30 % du total des acheteurs), afin d’encore mieux cerner l’accaparement de nos terres agricoles.
2.5. Très important : pour réaliser ces missions, « le Gouvernement se dotera des moyens nécessaires pour activer son droit de préférence » et « explorera la possibilité de prévoir un système de portage au bénéfice des jeunes et nouveaux repreneurs ».
Pour rappel, le droit de préférence ne concerne aujourd’hui que les terres appartenant à d’autres propriétaires publics et qui seraient mises en vente. L’objectif est donc principalement de préserver le caractère public de ces terres. Mais nous nous réjouissons que ce droit de préférence puisse être élargi, notamment avec un système de portage foncier, qui permettra à des jeunes de faire temporairement appel au financement public pour l’acquisition de terres, avec rachat progressif ensuite (le cas échéant par Terre-en-vue).
Ces moyens doivent être à la mesure des ambitions et des enjeux. Nous avons présenté notre calcul lors du débat du 16 mai dernier (qui peut être revu ici) et l’avons transmis dans notre note au Gouvernement en formation : pour pouvoir agir en moyenne sur 10 % des ventes, le Gouvernement devrait se doter d’au moins 75 millions d’euros par an pendant les 3 prochaines années. Nous espérons que ce budget sera prévu.
2.6. Ensuite, « le Gouvernement encadrera strictement les énergies renouvelables sur les zones agricoles ». Nous retrouvons là le plaidoyer que nous avons réalisé avec Agroecology In Action (AIA) et la FUGEA le 17 avril dernier (journée mondiale de luttes paysannes) pour s’opposer aux champs de panneaux photovoltaïques sur les terres agricoles. L’objectif est de préserver au maximum les terres agricoles pour la production nourricière et ce, a fortiori si d’autres espaces artificialisés peuvent encore être valorisés pour atteindre les objectifs énergétiques.
2.7. Enfin, « Le Gouvernement examinera aussi tout mécanisme (préemption, forme innovante de droit de propriété, etc.) qui permet de protéger les terres ayant une fonction nourricière ». Notre message relatif à la protection des terres a été écouté. En effet, Terre-en-vue place au centre de son action l’intérêt des agriculteurs.trices et des citoyens, en défendant la mise en place d’un mécanisme public pour protéger les terres agricoles et le développement de formes innovantes de droit de propriété (portage, indivision...).
2.8. Et last but not least, « le Gouvernement évaluera la réforme du bail à ferme et mettra en place des mesures incitatives et facilitera les échanges ». Certaines mesures pourraient effectivement encore faciliter l’accès à la terre, comme la mise en place d’un droit de préemption au bénéfice des agriculteurs dont la ferme est proche de la terre à vendre. Et comme nous l’avons souligné également, il est nécessaire de supprimer le double paiement imposé actuellement lors d’un échange de propriété.
Terre-en-vue se tient à la disposition du Gouvernement et en particulier de Madame la Ministre de l’Agriculture, pour soutenir la concrétisation de ces mesures concernant la politique foncière.
3. Concernant le reste du chapitre « agriculture », nous notons encore que le Gouvernement :
– considère que l’agriculture et l’alimentation sont étroitement liées et entend donc porter « une seule et même politique agricole et alimentaire comme socle de l’économie rurale, de la santé et de notre souveraineté alimentaire ».
– s’engage à dégager une rentabilité et des revenus équitables pour les agriculteurs
– travaillera à « réformer le statut d’agriculteur actif pour orienter les aides PAC vers les acteurs de l’agriculture familiale »
– défendra une agriculture qui préserve la santé
– « continuera à favoriser l’émergence de filières en circuits courts »
– encouragera le recours aux produits locaux et bio dans les écoles et cuisines de collectivités
– continuera à « soutenir fermement le secteur bio »
– encouragera la recherche et l’innovation
– « soutiendra les mesures d’adaptation au changement climatique et les pratiques favorables à l’amélioration des écosystèmes et qui enrayent le déclin de la biodiversité. »
Tout un programme !
Nous souhaitons beaucoup de courage à Madame la Ministre de l’Agriculture et nous continuerons nous-mêmes à prendre nos responsabilités en testant concrètement des formules innovantes d’accès à la terre (en particulier pour les fermes en agriculture biologique et en circuits courts), en remontant nos observations de terrain, en dénonçant les pratiques indésirables et contraire à la protection de nos terres agricoles et en encourageant l’adoption des mesures fortes qui viennent d’être annoncées.